procédures civiles: le taux de ressort et les sanctions concernant les vices de procédures

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Thème 5 : Le taux de ressort

 

On a la compétence territoriale (champ de compétence sur le plan géographique) et la compétence d’attribution (par rapport à la nature de l’affaire) :

-          compétence exclusive : une seule juridiction.

-          compétence concurrente : différents types de juridiction

 

Pour savoir quelle juridiction est compétente, il faut des mécanismes d’orientation. Dans notre système, c’est la valeur du litige qui détermine quelle juridiction est compétente. Moins le litige sera important et plus se sera une juridiction de moindre importance et inversement. Articulation entre trois juridictions : le juge de proximité, le tribunal d’instance et le tribunal de grande instance. La valeur du litige va servir pour déterminer selon le montant la juridiction mais aussi le taux du ressort. On emploie le terme ressort dans deux acceptions :

-          ressort territorial : délimitation géographique de la compétence.

-          le taux de ressort : est-ce qu’une décision est appelable ? Est-ce que la décision est rendue à charge d’appel ou pas ?

 

C’est le travail du juge. La matière est difficile parce qu’elle fait intervenir des règles d’application compliquées. Pour déterminer le taux du ressort ou le taux de compétence, il faut faire intervenir plusieurs règles entre elles. Les parties peuvent influencer l’opération de qualification du juge selon comment elles présentent leur demande.

 

Chapitre 1 : Les mécanismes légaux du taux de compétence et du taux de ressort

 

Art 34 à 40 du CPC.

 

Section 1 : Le taux de compétence

 

Le critère de répartition sera le montant de la ou les demandes. On sait que pour une même matière, plusieurs juridictions sont compétentes et ce n’est que la valeur qui va déterminer laquelle va connaître de l’affaire. Le montant est le critère de répartition. Cette matière a été bousculée par la loi du 26 janvier 2005 qui a prévu que le montant du taux de compétence pour la juridiction de proximité est de 4.000€. Pour le TI, c’est entre 4.000 et 10.000€. En l’espace de 10 ans, le montant a doublé. Au-delà de 10.000€, c’est le TGI. Il faudra vérifier que l’on n’est pas en présence d’une compétence exclusive car le montant de l’amende importe peu. Cela ne joue qu’en matière de compétence concurrente (pas de texte qui attribue une compétence exclusive). Exemple : TI est exclusivement compétent pour le crédit à la consommation, les baux d’habitation…

 

Section 2 : Le taux du ressort

 

L’article 34 pose que le taux du ressort correspond au montant de l’amende au dessous duquel l’appel n’est pas admis. Le jugement sera rendu en 1er ou en dernier ressort. En dernier ressort, le jugement n’est pas attaquable par la voie de l’appel. Dans le cas contraire, l’appel est possible. On sait cela à la lecture de la décision. Un jugement civil est divisé en trois parties :

-          exorde : fait, procédure, demandes des parties et moyens en droit et en fait.

-          motif de la décision (introduit par la formule « sur ce ») : c’est la motivation en droit et en fait du juge sur le raisonnement juridique qu’il utilise pour aboutir à la solution.

-          le dispositif (« par ces motifs »). On termine la décision en disant que c’est en 1er ou dernier ressort. Cela commande le régime de la décision.

 

Cette règle s’applique à toutes les demandes mais il existe une exception.

 

            A/ Le montant général du taux du ressort

 

C’est le même pour l’ensemble des juridictions du 1er degré. C’est 4.000€ par la loi du 26 janvier 2005. En dessous de 4.000€, c’est sans appel. Au dessus, c’est à charge d’appel.

 

            B/ Le taux spécial devant le conseil de prud’hommes

 

L511-1 Code du travail. Le taux de ressort peut évoluer annuellement. Il est fixé annuellement par décret. Le gouvernement peut prendre l’initiative d’un réajustement annuel. Depuis 2005, il n’y en a pas eu. C’est le même que le taux de compétence (4.000€). D517-1 Code du travail.

 

Section 3 : Exception à la limitation du taux de ressort

 

Art 40 CPC. Quand on est en présence d’une demande indéterminée, c’est toujours à charge d’appel. Le litige doit pouvoir être chiffré en argent. Des demandes n’ont pas de valeur monétaire ou ne sont pas chiffrables. Exemple : demande en nullité, demande en résolution du contrat, reconnaissance d’une servitude, demande en divorce… On peut discuter sur la demande de fixation d’une astreinte : inciter quelqu’un à faire quelque chose ou à ne pas faire. La demande qui vise à fixer une astreinte est indéterminée. Le but est de faire exécuter. Si l’auteur ne s’est pas exécuté malgré l’astreinte, la victime peut venir en liquidation d’astreinte. C’est une demande chiffrée ; elle est déterminée.

 

La demande indéterminée à l’avantage de procurer un jugement qui ouvre la voie de l’appel. Certaines parties veulent faire qualifier du déterminé en indéterminé. Une partie veut qu’on lui rende justice ; les conséquences monétaires ne l’intéressent pas. Exemple : sanction de l’adversaire en demandant l’euro symbolique. Ce n’est pas une demande indéterminée. Même demander un euro, c’est chiffré. C’est le juge qui devra apprécier le caractère déterminé de la demande. Il ne peut pas se substituer aux parties pour évaluer lui-même en cas de demande indéterminée. Lorsqu’une demande est chiffrable mais que la partie ne le fait pas (assure pas son office), la Cour de Cassation donne des définitions :

-          Soc, 24 novembre 1978 : il faut inviter les parties à chiffrer leur demande. Si elles ne le font pas sur invitation expresse, il faut déclarer la demande irrecevable sur le fondement de l’article 4.

-          une partie s’abstient de chiffrer mais renvoie aux pièces du dossier.

-          partie qui dans ses conclusions réclame le paiement des sommes dues sans fournir les éléments qui permettent au juge de voir quelles sont ses sommes. Civ 2e, 10 février 2000 et Civ 3e, du 20 décembre 2000 : il faut inviter les parties à le faire et le juge peut débouter la partie de sa demande. On considère qu’elle n’est pas irrecevable. Cela revient au même : soit elle fait rien, soit elle fait un peu.

 

Chapitre 2 : Les principes d’évaluation des demandes

 

Il s’agit du montant de la demande telle qu’elle figure dans l’assignation ou des conclusions postérieures.

 

Section 1 : Les règles communes

 

Le juge ne fait que considérer les demandes. Il ne porte pas de jugement de valeur sur la demande. Le montant de la demande s’apprécie toujours en principal. C’est la somme du capital et des intérêts échus au jour de la demande. Le montant d’une clause pénale fait parti du principal. Seront exclus les accessoires : intérêts échus depuis la demande, les dépens et la demande d’article 700 (frais qu’on a exposé pour organiser sa défense = frais d’avocat).

Selon la complexité du litige et la présence au procès de plusieurs parties, les articles 35 et suivants vont prévoir des règles différentes :

-          nécessité de distinguer la demande principale formulée par le demandeur de la demande incidente, formulée par le demandeur après la demande initiale.

-          nécessité de distinguer selon le nombre de partie.

 

Section 2 : Les règles particulières

 

Il peut y avoir un défendeur qui se contente de dire qu’il ne doit rien. L’article 35 opère une distinction selon que les prétentions sont fondées sur un fait unique ou des faits connexes ou des faits différents. La connexité est le lien ou le rapport étroit qui existe entre les faits. Quand on est en présence d’un fait unique ou connexe, on cumule le montant des demandes sauf si l’une des demandes est subsidiaire par rapport à l’autre (Civ 2e, 24 octobre 1984). Lorsque les faits sont différents, l’évaluation se fait pour chacun des faits de demande. Le juge va pouvoir être compétent sur une demande mais pas sur l’autre parce qu’on les apprécie différemment. C’est une hypothèse binaire où le défendeur se contente de se défendre.

 

Hypothèse de la pluralité de parties : art 36 qui distingue selon que les prétentions sont émises en vertu d’un titre commun ou non :

-          s’il y a absence de titre commun, les prétentions de chaque partie sont indépendantes les unes des autres et les prétentions d’un même demandeur s’ajoutent si elles sont connexes (si elles s’appuient sur des faits connexes).

-          s’il y a un titre commun, il faut déterminer la valeur la plus élevée quelle que soit la partie qui la demande. Les prétentions ne s’ajoutent pas comme des demandes connexes et l’appréciation du taux de compétence et de ressort sera identique pour tous les demandeurs.

 

Un titre commun est un acte constituant la source d’un droit. Cela peut être un contrat, un titre de propriété, un titre de créance, des statuts de société, d’un syndicat. Cette notion n’est pas reconnue aux victimes d’un même fait générateur. Exemple : accident de transport en commun où toutes les victimes ont un préjudice causé par un même générateur. Il y a un fait générateur commun mais le préjudice de chacun est distinct pour chaque partie. La jurisprudence refuse de reconnaître le titre commun pour la responsabilité délictuelle (Civ 2e, 29 avril 1997).

 

La demande incidente est définie à l’article 63 du CPC. La demande reconventionnelle est précisée à l’article 64 : le défendeur prétend obtenir un avantage autre que le rejet de la prétention de son adversaire. La demande additionnelle est à l’article 65 : une partie modifie ses prétentions antérieures. L’intervention du tiers est à l’article 66 : le tiers se greffe à un procès où il est étranger. Il peut y être attrait (intervention forcée comme l’appel en garantie) et l’intervention volontaire. Leur sort est réglé par les articles 37 et 38. Il faut les prendre en compte. Il y a des règles différentes qu’il s’agisse d’analyser le taux de compétence ou de ressort. Pour le taux de compétence, c’est la règle générale de l’indépendance des demandes incidentes entre elles et par rapport à la demande principale. Si on est devant le TI, elle sera examinée si elle est inférieure ou égale à 10.000€ mais l’article 38 prévoit que lorsqu’elle est supérieure, le TI a une option :

-          soit il statue sur la demande principale et se déclare incompétent sur la demande incidente (dissociation du régime).

-          soit il renvoie le tout au TGI pour éviter la dissociation.

 

Cette question de compétence ou d’incompétence résultant de la demande principale ou incidente devra avoir été soulevée par les parties. L’article 41 prévoit un cas de prorogation de compétence. Le TI a une option à condition d’avoir soulever l’incompétence devant lui ; si personne n’a rien dit, il va juger alors qu’il est incompétent. Il ne peut pas soulever le moyen d’office. Les parties peuvent se mettre d’accord pour faire juger une affaire à un tribunal qui n’est pas compétent. La célérité peut présenter des avantages (obtenir un jugement plus vite, jurisprudence qui ne convient pas…). Une fois que la partie l’a soulevé, le TI a une option.

 

Il y a des demandes qui ne sont pas prises en compte dans le calcul du taux de compétence : lorsque la demande reconventionnelle porte sur des dommages et intérêts fondés exclusivement sur la demande initiale. Il y a un lien qui unit les deux demandes et qui fait que le juge en connaît quel qu’en soit le montant. C’est la demande pour procédure abusive. Elle n’est conditionnée que par l’existence de la demande principale.

 

Le taux du ressort est prévu à l’article 39 du CPC. Lorsque la demande incidente est inférieure ou égale à 4.000€, elle est prise isolément sauf si elles sont connexes ou fondées sur les mêmes faits. Dans ce cas, elles se cumulent entre elles et s’ajoutent à la demande initiale. Lorsqu’elles sont supérieures à 4.000€, le jugement est prononcé en 1er ressort ; la demande de dommages et intérêts fondée sur la demande principale n’est pas prise en compte.

 

Devant le conseil de prud’hommes, l’appréciation des chefs de demande se fait différemment car l’article R517-4 du Code du travail prévoit des règles particulières. Lorsqu’aucun chef ne dépasse à lui seul le taux du ressort, la voie de l’appel n’est pas ouverte. L’appréciation est effectuée par chef de demande. Soc, 17 juillet 1996 ; 12 mars 1997. Il faut faire deux groupes de demande ; les demandes à caractère salarial et les demandes à caractère indemnitaire. On regarde si l’un de ses deux groupes dépasse le taux de ressort. Cela a vocation à faciliter l’appel car on cumule par chef de demande.

 

L’opération de qualification est une opération judiciaire. Les parties n’ont pas à intervenir. Le juge peut se tromper. Cela a comme conséquence d’ouvrir ou non la voie de l’appel. La signification ou la notification va appliquer la règle en fonction de ce qu’à dit le juge. Si l’appel est ouvert, l’huissier le dit. Si c’est un jugement en dernier ressort, il dit que le seul recours est le pourvoi. L’article 536 indique qu’il n’y a pas d’influence sur le droit de recours. Comment s’y prendre ? Avant le décret du 20 août 2004, c’était le parcours du combattant : il fallait faire annuler la signification parce qu’elle n’indiquait pas la bonne voie de recours. Le décret a complété l’article 536 et prévoit que la décision d’irrecevabilité rendue par la juridiction saisie va être notifiée par le greffe de la juridiction saisie et c’est elle qui fait courir le délai pour faire appel. La décision d’irrecevabilité permet d’ouvrir le délai pour former le pourvoi ou l’appel.

 

Thème 6 : Les sanctions concernant les vices de procédure

 

Lorsqu’il y a des problèmes afférents aux actes de procédure, on peut arguer ces actes de nullité. Il faut étudier ce régime des nullités qui touche les actes de procédure. Il faut définir la notion de nullité en la distinguant de la fin de non recevoir ou de l’inexistence de l’acte. La nullité est une sanction qui vise le formalisme rédactionnel des actes ainsi que les modes de délivrance des actes de procédure. La fin de non recevoir sanctionne la déchéance du droit d’agir par l’inobservation d’un délai ou d’une formalité (article 125). C’est la perte du droit d’agir. Le régime des nullités touche au formalisme de l’acte et n’aura pas de conséquences aussi importantes que le fait de ne pas pouvoir agir. L’inexistence sanctionne l’acte qui est dépourvu d’efficience. L’acte a une existence purement matérielle. Il n’a aucun effet juridique. Il n’est pas régularisable. L’inexistence est utilisée lorsqu’on fait une formalité à la place d’une autre. Exemple : pour faire appel, on interjette appel par le moyen d’une déclaration qui est adressée aux greffes de la Cour d’appel. On ne peut faire appel que par ce moyen. Le fait de formaliser un acte d’appel par un acte d’huissier n’existe pas (Civ 2e, 15 octobre 1980). Le fait de faire appel directement aux greffes de la Cour d’appel au lieu des greffes du tribunal qui a rendu la décision, rend l’acte inexistant (Soc, 9 mars 1989). Il y a d’autres sanctions lorsqu’un acte doit être accompli sous peine de caducité. C’est l’absence de diligence qui doit être fait dans un certain délai.

Le champ d’application de la nullité est large. Cela s’étend aux actes extrajudiciaires (actes d’huissier = article 649 pour les actes de procédure). Cela s’applique aux congés donnés par acte d’huissier ou notifiés par LRAR car soumis aux prescriptions de l’article 694. Cela s’attaque aux actes judiciaires qui sont accomplis par un auxiliaire de justice : signification, actes d’exécution d’une décision…

 

Chapitre 1 : Les vices de forme

 

Le vice de forme constitue l’omission ou le non respect d’une règle formelle de rédaction ou de notification d’un acte.

 

Section 1 : Les conditions de la nullité

 

Art 114 : il faut deux conditions cumulatives pour que le juge prononce une nullité. La nullité doit être expressément prévue par la loi sauf en cas d’une inobservation substantielle ou d’ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu’à charge de prouver le grief que lui cause l’irrégularité. Celui qui demande la nullité d’un acte doit alléguer un grief et en faire la preuve. La nullité n’est pas automatique.

 

            A/ La nullité textuelle

 

C’est l’adage « pas de nullité sans texte ». C’est une règle ancienne de notre droit. On trouve dans le Code, pour les actes d’huissier, l’article 649 ; les actes de signification (art 693 et 694)… Ce sont des vices qui vont affecter l’acte lui-même. Lorsqu’une date est prescrite à peine de nullité, se sera un vice de forme. L’omission, dans la signification, sans faire figurer à qui a été remis l’acte, est punie de la nullité.

Les formalités substantielles ou d’ordre public donnent à l’acte sa nature, caractère et qui en constitue sa raison d’être. Cela recouvre tout ce qui est essentiel au droit de la défense. Exemple : on ne sait pas si l’acte a été signifié par un huissier, la copie signifiée n’a pas de tampon « certifiée conforme à l’original »… Ces omissions altèrent les actes.

 

            B/ La preuve du grief

 

Il ne suffit pas de pointer le doigt sur une omission ou une irrégularité. Il faut démontrer que cela porte atteinte au droit de la défense. C’est une appréciation in concreto. C’est à celui qui s’en prévaut d’apporter la preuve. Toute personne a droit à un procès juste et équitable et doit proposer des moyens de défense. Le formalisme est là pour garantir le déroulement équitable du procès. Il faut qu’il y ait des répercutions effectives sur l’exercice des droits de la défense.

Il faut ensuite établir la réalité de ce préjudice. La jurisprudence apprécie de façon restrictive : il faut apporter la démonstration que celui qui a soulevé la nullité en a souffert. A partir du moment où un grief est allégué, il faut que l’autre conteste la pertinence de la réalité du grief. Si l’autre ne le conteste pas, le juge peut penser que le grief est établi (Civ 2e, 9 mai 1988). Le juge ne peut pas soulever d’office un grief non évoqué. Le juge ne peut pas venir au secours des parties. C’est une appréciation souveraine du juge du fond. La Cour de Cassation n’exerce pas son contrôle. Il y a beaucoup de contentieux sur cette question. Art 472 : le juge est face à une partie et l’autre n’est pas venue. Il peut juger. Le juge peut faire droit à la demande mais à la condition que sa saisine soit régulière. Il peut aller chercher lui-même les vices de forme et prononcer la nullité si cela porte atteinte à celui qui est absent. Si le défendeur est présent, il est en mesure d’argumenter et d’apporter des éléments sur l’irrégularité ; l’appréciation du juge sera plus restrictive.

Un autre domaine est un terrain d’élection dans la recherche de nullité de forme : lorsque la signification d’un jugement a été faite selon un autre mode que la délivrance à personne. On a un jugement de condamnation pris en l’absence du défendeur ; l’assignation avait été délivrée régulièrement sauf qu’il ne vient pas ; le juge fait droit à la demande. Le jugement sera signifié à l’adversaire. La signification peut se faire à domicile ou en l’étude de l’huissier ; dans ce cas, on est certain que l’acte n’a pas été remis à personne. C’est la date de signification qui fait courir le délai d’appel d’un mois. Après plusieurs mois, l’absent fait mine de découvrir qu’il a été condamné. Il soulève le fait qu’il n’était pas comparant et le fait que l’huissier ne l’a pas trouvé. Il attaque la signification ; si la nullité est prononcée, cela n’aura pas fait courir le délai d’appel. C’est une tentative de pouvoir sauver ce qui peut l’être encore. Il y a beaucoup de jurisprudence sur ce point là. Elle considère qu’il n’y pas de grief car celui qui soulève l’exception de nullité n’établit pas en quoi l’absence de signification à personne lui a empêché de faire un recours.

Il y a une possibilité de régularisation (art 115). On peut régulariser l’acte si aucune forclusion n’est intervenue. Elle ne doit pas laisser subsister le grief. On peut refaire un acte parce que le premier n’est pas bon. Si on attend que le juge prononce une nullité, c’est une perte de temps. On peut régulariser mais il faut toujours être dans le délai pour agir. L’appréciation se fait acte par acte (intrinsèquement) : on ne peut pas faire un acte en complément d’un autre parce qu’on a fait un oubli dans le premier. Il faut refaire l’acte en entier.

 

Section 2 : La formulation de la nullité

 

            A/ Qui peut soulever le moyen de nullité ?

 

C’est la partie contre qui l’acte a été fait. C’est une nullité relative. L’auteur de l’acte ou une partie que l’acte ne concerne pas ne peut pas s’en prévaloir sauf si l’acte est indivisible (il concerne plusieurs parties). C’est à celui à qui on oppose l’acte à faire valoir cette exception.

 

            B/ Quand ce moyen doit-il être soulevé ?

 

L’exception doit viser un acte précis. Il faut s’attacher à identifier quel acte et quelle omission est pointée dans cet acte. Elle doit être formulée in limine litis, avant toute défense au fond. Le fait d’évoquer le fond purge l’irrégularité. L’irrégularité, on peut s’en apercevoir après avoir conclu au fond mais c’est trop tard. La fin de non recevoir doit être formulée après l’exception de nullité. Si c’est fait avant, cela couvre la nullité. On peut parler de plusieurs choses dans un même jeu de conclusion mais il fait faire attention à ce que l’on invoque. La seule chose que l’on peut invoquer c’est l’exception d’incompétence. Si on invoque la nullité sous forme subsidiaire, ce n’est pas bon ; il faut le faire à titre principal. On peut avoir plusieurs irrégularités. L’article 113 fait la police : tous les moyens de nullité contre les actes de procédure déjà faits doivent être soulevés simultanément à peine d’irrecevabilité de ceux qui ne l’auraient pas été. Cela pourrait être interminable. Le législateur veut éviter le dilatoire. Les actes qui n’auront pas été invoqués sont irrecevables. Les actes faits après pourront être critiqués.

 

Chapitre 2 : Les irrégularités de fond

 

Art 117. Le régime des nullités du fond est plus souple. Ces nullités ne sont pas obligatoirement faites in limine litis. Les plaideurs essayent d’habiller une irrégularité de forme par une irrégularité de fond. Il n’y a pas besoin de faire la preuve d’un grief. Le régime est plus souple parce que les irrégularités sont plus graves.

 

Section 1 : Les causes de nullité de l’article 117

 

Il s’agit d’abord du défaut de capacité d’ester en justice.

 

            A/ Le défaut de capacité d’ester en justice

 

Il faut distinguer selon que l’on a affaire à une personne physique ou morale.

C’est une condition de fond de l’acte. Le mineur ne peut pas ester en justice ; il doit être représenté par son parent ou son représentant légal. Le mineur peut agir seul pour sa propre protection (art 375 du Code civil = protection judiciaire). Lorsqu’il s’agit de majeur incapable, le fait de délivrer une assignation directement au majeur en curatelle est un vice de fond. Le curateur doit être informé du procès qui est fait contre la personne qu’il protège (Civ 2e, 7 mars 1984). Une procédure diligentée au nom d’une procédure décédée est nulle (article 372) : les actes de procédure postérieurs au décès sont caducs. C’est l’hypothèse où la procédure démarre contre ou par une personne décédée mais il peut y avoir une personne qui décède en cours d’instance. Le décès de l’une des parties est une cause d’interruption de l’instance. Se sont ses héritiers qui pourront reprendre l’action s’ils ont accepté la succession.

Le groupement doit disposer de la personnalité morale. Va être susceptible de nullité un acte de procédure dressé pour le compte d’une société qui a cessé d’exister (Com, 29 mai 1972), ou qui a été absorbée (Com, 21 février 1966), une société qui n’est pas immatriculée au RCS. L’acte de procédure est nul parce que le groupement qui fait l’action n’a plus la personnalité morale…

 

B/ Le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès comme représentant soit une personne morale soit une personne atteinte d’une incapacité d’exercice

 

Une fois que le mineur devient majeur, le représentant légal perd son pouvoir et ne peut plus faire d’action pour son compte. Un indivisaire ne peut représenter l’indivision que s’il est titulaire d’un mandat ou d’une autorisation judiciaire. En cas de défaut, il ne peut pas représenter à lui seul l’indivision. Ce défaut de pouvoir est fréquent pour la représentation des personnes morales : action intentée contre le DRH qui n’a pas de pouvoir pour représenter la société. C’est le cas d’un appel formé par un salarié qui n’a pas de pouvoir pour faire cet acte. Pour une association, le pouvoir d’agir du président découle de son pouvoir de représentation en fonction de ses pouvoirs civils mais il peut y avoir des dispositions particulières dans les statuts ou une délibération. Lorsqu’il existe une omission ou une erreur dans l’indication du nom de représentant légal, la jurisprudence considère que ce n’est pas un vice de fond mais un vice de forme (Civ 2e, 5 février 1975).

 

Lorsqu’on n’indique pas la forme de la société ou son représentant légal dans l’acte d’appel, on a eu une grande bataille entre deux chambres de la Cour de Cassation. On avait de la jurisprudence de la chambre commerciale (arrêt de 1998) qui disaient que c’était une irrégularité de fond et des arrêts de la 2e chambre civile (arrêt de 2001) qui revenaient à la solution initiale de vice de forme. La chambre mixte de la Cour de Cassation le 22 février 2002 a choisi l’option de la nullité de forme. L’enjeu était important. La chambre mixte a une certaine autorité.

 

            C/ Le défaut de capacité ou de pouvoir d’une personne assurant la représentation en justice

 

L’auxiliaire de justice ne peut pas ou plus représenter une partie. L’article 417 pose le principe de la présomption de mandat reçu du client. En matière d’inscription en faux (art 306), serment (art 322), de saisie immobilière pour la délivrance aux fins de saisie immobilière, il faut un mandat spécial du client. Dans toutes les autres hypothèses, l’avocat est présumé avoir l’accord du client. L’article 417 pose une présomption ; elle peut être combattue par la preuve contraire (Civ 2e, 27 février 1980). Cette présomption ne peut être combattue que par celui qui est réputé avoir donné mandat. En matière de représentation non obligatoire (irrégularité de fond), on peut mandater quelqu’un d’autre qu’un avocat pour nous représenter : le conjoint… Il faut un mandat spécial.

 

Section 2 : Les autres causes de nullité

 

La Cour de Cassation considère par plusieurs arrêts (Civ 2e, 30 novembre 1970, Civ 2e, 15 mars 1989) qu’il y a régularité de fond pour l’article 117 mais pas en dehors. Sauf pour les violations de règles d’organisation judiciaire, il lui arrive de recourir au concept d’irrégularité de fond. Le principe énoncé est de dire que 117 est un article exhaustif mais il existe des nullités pour les violations de règles d’organisation judiciaire. Exemple : huissier qui fait des actes dans un ressort où il n’est pas compétent. Il y a l’hypothèse où la loi avait prévu la création du JEX mais les décrets d’application n’étaient pas sortis ; on ne pouvait pas le saisir ; c’est ce qu’avait fait un plaideur mais cela a été considéré comme une nullité de fond. C’est le cas également lorsqu’il y a violation de principe fondamentaux du droit civil comme le contradictoire : huissier qui signifie un acte à une autre personne que celle qui est concernée (un jumeau) ou la régularisation par un acte complémentaire (15 novembre 1995). Il y a aussi la violation du non respect du délai de 15 jours de l’article 856 devant le tribunal de commerce (Civ 2e, 12 juin 2003). C’est un délai minimum entre la délivrance de l’assignation et la date d’audience. Civ 3e, 24 janvier 1996 : congé donné dans une autre forme que celle donnée par le texte (lettre simple au lieu de LRAR). Le formalisme protège les droits de la défense. Souvent, dans cette matière, c’est limite : c’est difficile d’y voir des enseignements généraux, se sont souvent des arrêts d’espèce. Sur la violation des règles d’organisation judiciaire, il n’y a pas de problème. Pour le reste, c’est une violation de règle de forme mais avec des exceptions ponctuelles. Il y a une forte pression des plaideurs à voir de la nullité de fond là où il n’y en a pas.

 

Section 3 : Le régime des nullités

 

Art 118 : on peut découvrir une irrégularité de fond à tout moment et même en cause d’appel. Art 119 : l’exigence d’un grief n’est pas prévue ; il suffit de faire constater l’irrégularité pour qu’elle soit prononcée. On peut voir le problème, se garder de le dire et le dire au moment le plus opportun. Cela peut être une technique procédurale.

 

Il est possible de régulariser. C’est l’article 121 qui prévoit cette hypothèse. Puisqu’on n’exige pas de préjudice, il suffit de régulariser. Elle ne sera pas toujours possible parce que des fois, on ne peut pas. Exemple : délai pour agir expiré. Il faut qu’elle intervienne avant que le juge statue. C’est possible de régulariser en cause d’appel.

 

Les obligations du juge : l’article 120 distingue selon la nature de l’irrégularité, qu’elle affecte ou non l’ordre public :

-          quand l’irrégularité a un caractère d’ordre public, le juge doit relever la nullité d’office. Le juge doit faire un contrôle maximum et le mettre dans le débat.

-          quand il y a un défaut de capacité, le juge peut relever d’office l’irrégularité. C’est une faculté.

 

Dans l’hypothèse où il relève d’office, il doit avoir recueilli les observations des parties (principe du contradictoire). Lorsque l’acte est annulé, tous les actes qui en sont la conséquence sont également annulés.

 

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